Mt 23,1-12
Le texte de ce dimanche, nous mets attention sur le paternalisme. En effet, après la destruction du Temple de Jérusalem en l’an 70 de notre ère, le groupe religieux des pharisiens a joué un rôle important dans la société juive. La religion juive, jadis caractérisée par les holocaustes et autres sacrifices offerts au Temple, a pris une nouvelle orientation centrée sur la méditation de la Parole de Dieu. C’est ainsi que les pharisiens, ces spécialistes des Ecritures, seront régulièrement sollicités par ceux qui voudraient obtenir quelques précisions sur le sens des certains passages de la Parole de Dieu. C’est dans ce sens et contexte que se répandront alors les titres tels que rabbi (Mon grand), Rabbouni ( Mon Seigneur), maitre, etc.
La lettre tue, l’Esprit vivifie
N’appelez personne Père, Maitre, Docteur… nous dit Jésus dans la lecture de l’Evangile de ce jour ( Mt 23, 8-10). Et pourtant, dans certains passages des Ecritures, l’on remarque des allusions à ces titres interdits par Jésus. Dans la lettre aux Thessaloniciens, par exemple, saint Paul se considère « comme un père » (1 Th2, 11 ; cf. Ph 2, 22) ; il exhorte même aussi Timothée à se comporter face aux chrétiens « comme un père » (1 Tm5, 1). Bien plus, plusieurs passages du nouveau Testament attribuent à Abraham le titre de « Père des croyants » (cf. Lc 1, 73 ; Jn 8, 56 ; Ac7, 2 ; Rm 4, 12.16 ; Jc 2, 21). De même dans les communautés chrétiennes du Nouveau Testament, l’on voit apparaître le tire didaskalos (maître ou docteur) interdit par Jésus en Mt 23, 8 ( cf. Ac 13, 1 ;1Co 12, 28.29 ; Ep 4, 11 ; Jc 3, 1).
Que dire au regard de ces divergences entre les directives de Jésus et les orientations prises par les communautés chrétiennes ? Saint Paul nous a livré un principe important dans l’interprétation des Ecritures : « La lettre tue, l’Esprit vivifie » (2 Co 3, 6). Ainsi, ces directives du Seigneur ne sont pas à prendre à la lettre ; il faudrait plutôt en saisir l’esprit. C’est ce que firent les communautés chrétiennes du Nouveau Testament. Au lieu de prendre à la lettre les paroles de Jésus, elles ont taché de les interpréter en tenant compte de leur contexte.
Pourquoi il faut-il combattre le paternalisme ?
Quand Jésus interdit à ses auditeurs et à nous aujourd’hui d’user des titres Père, Maître, Docteur…, Il voudrait combattre le paternalisme chrétien. Un paternaliste, c’est celui, qui au lieu d’orienter les autres vers le véritable Maître qui est le Christ, se prend lui-même comme référence et s’impose personnellement comme modèle à suivre dans une communauté chrétienne. C’est le cas des pharisiens qui formaient leurs disciples à leur propre image si bien qu’ils les rendaient pires qu’eux-mêmes (cf. Mt 23, 15).
Les titres dénoncés par Jésus en Mt 23, 8-10 exposent souvent les chrétiens à ces genres d’attitude paternaliste. Les communautés chrétiennes devraient donc bannir le paternalisme et utiliser ces titres comme des moyens qui permettent aux chrétiens de découvrir le véritable Père, le véritable Maître, qui est le Christ lui-même. C’est à cela au fait que Saint Paul nous invite en Galates 4, 19 : « mes petits-enfants, vous que j’enfante à nouveau dans la douleur jusqu’à ce que le Christ soit formé en vous ». Dans ce passage, bien qu’il appelle les Galates « mes petits enfants », il n’oublie pas que ceux-ci doivent être formés à l’image du Christ (et non à l’image de Paul). Ainsi, la paternité spirituelle de l’Apôtre sur les Galates ne l’a pas entrainé au paternalisme. Demandons au Seigneur notre Maître parfait, la grâce d’être pour les autres des modèles qui font découvrir Dieu au milieu de son peuple.
Abbe Jean Claude Cabwinwe Ciza