Mc 16, 1-8.
De grand matin, trois femmes accourent au tombeau. En tête, nous avons Marie de Madgala, la pécheresse qui aimait Jésus. L’amour leur fait presser le pas. Pas de crainte ni de honte. Que peuvent-elles faire pour un cadavre? L’irrémédiable a eu lieu. Elles ne pourraient le renverser. Seulemennt apporter un baume pour oindre le coprs afin qu’il repose décement, et que la décomposition soit retardée un peu.
Desemparées, elles ne savent même pas si elles pourront le contempler une dernière fois, car la pierre du tombeau est trop lourde pour être roulée par des femmes. Pour autant, elles ne se sont pas découragées. Malgré tout, elles courent au-devant de l’impossible. Amour aveugle, foi qui pressent l’événement imprévisible.
Jésus est vivant
Or, en arrivant au tombeau, dès le premier regard, elles aperçoivent que l’Evènement a eu lieu, que l’impossible s’est réalisé, et elles apprennent de la bouche de l’Ange que ce qui était irrémédiable vient d’être détourné de son cours normal et repris en main par Dieu lui-même, que le Crucifié est maintenant ressuscité, que le petit volume d’espace enserré entre les parois du sépulcre, où le corps de Jésus, hier encore, se trouvait localisé, est désormais vide, que ce vide, cette absence, est devenu le signe d’une présence nouvelle, que le néant proclame la plénitude : « n’ayez pas peur ! […] Il est ressuscité : Il n’est pas ici , : voici l’endroit où on l’avait déposé . » Ici, il s’agit bien d’un homme mort. Et Il est Vivant ! Ce que ni leur parfum, ni leur amour n’auraient pu faire, Dieu vient de le réaliser. Il est Pâques. L’impossible pour certains, pour les impies, les incroyants devient réalité, possible pour nous croyants. L’Ange affirme cela aux femmes qui ont vu mourir Jésus sur la croix, qui ont contemplé son cadavre pendant la mise au tombeau et qui venait l’embaumer.
Les trois femmes mettront longtemps à comprendre ce qui s’est passé. Le bouleversement est tel que, pour l’heure, elles s’enfuient toutes tremblantes, dit l’évangile, et hors d’elles-mêmes. Et contrairement à ce que l’ange leur a enjoint, elles n’annoncent rien à personne, car elles ont peur. Le message de l’Ange est clair « n’ayez pas peur ! »
Le mystère de Pâques au cœur de notre monde
Comme ces trois femmes, nous venons voir nous aussi un cadavre, nous sommes encore dans le monde où un crucifié est un mort. Et voici soudain l’autre monde : un ange, et donc un message de Dieu. C’est ce message qui les a fait trembler et nous fait trembler aussi.
Car la terre aussi a tremblé et s’est disloquée, et les enfers tremblent encore et ont poussé un hurlement, dit la liturgie, au moment où la force de Dieu les a pénétrer pour arracher le Fils Bien –aimé au pouvoir de la mort et le rendre à la vie. Tel est le mystère de Pâques et sa force au cœur de l’Eglise et au cœur de notre monde. Non pas que la mort n’ait plus lieu, ni que le mal ait disparu, ni que le péché soit devenu impossible. Mais que Dieu en personne entre dans la mort pour la retourner de l’intérieur, qu’il vienne épouser les fruits du mal pour que celui-ci soit restauré en bien, qu’il prenne sur lui les péchés du monde, pur qu’ils soient pardonnés et rejaillissent en amour et en vie nouvelle.
La lourde pierre n’était pas seulement sur le tombeau. Elle obstruait aussi tant de cœurs qui avaient besoin du choc pascal, du regard ou de la voix de Jésus ressuscité, pour la faire sauter. Marie-Madeleine, la toute première, dès qu’elle entendra son nom sur les lèvres de Jésus. Et les deux disciples d’Emmaüs, livrés à leur désespoir, dès qu’il leur rompra le pain. Et Pierre lui-même, encore tout à la honte de sa chute, dès que Jésus se fera voir de lui. Et plus rapidement encore, l’élu de la dernière heure, le larron sur la croix de droite, qui, dès aujourd’hui, c’est-à-dire, avant tout le monde, avant les saints et les justes de l’Ancien Testament, est avec Jésus dans le Paradis.
Alors comment désespérer de la pierre qui pèse encore sur notre propre cœur et dont nous savons très depuis longtemps que nous sommes incapables de la faire bouger, nous aurions tant voulu que nos efforts aboutissent ; nous aurions souhaité que cette pierre n’eut jamais été là. Mais Jésus à préférer qu’elle y soit comme sur le tombeau de sa Pâques, pour que nous aussi, un jour, nous nous heurtions à la force de sa résurrection, et qu’elle vole enfin au éclats, Jésus réalisant en nous l’impossible, en ramenant sur ses épaules ce qui semblait irrémédiablement perdu.
Père Jean Claude Cabwinwe Ciza, la République Démocratique du Congo