En ce quatrième dimanche de Carême, appelé dimanche d’Israël, les lectures nous introduisent au thème de la réconciliation.
La réconciliation, c’est la restauration d’un état qui avait été par être détruit, brisé. La réconciliation apporte la paix, l’harmonie. Elle est source de guérison.
Le Christ ressuscité, lorsqu’il apparut à ses disciples dont plusieurs, pour ne pas dire beaucoup, l’avait trahi, leur dit ces belles paroles que nous rapporte saint Jean : « La paix soit avec vous » (Jn 20, 19, 23). « En voyant le Seigneur, poursuit saint Jean, les disciples furent tout à la joie ».
En effet, la réconciliation appartient au registre pascal, au domaine du salut. Et cela se voit bien dans nos lectures.
Dans la première lecture, du livre de Josué, il est dit : « Après le passage du Jourdain, le Seigneur dit à Josué : “Aujourd’hui je vous ai enlevé l’humiliation subie en Égypte”. Les Israélites campèrent à Guilgal et célébrèrent la Pâque le quatorzième jour du mois, vers le soir, dans la plaine de Jéricho ». Ici la réconciliation, c’est le passage de l’humiliation à la dignité. C’est le recouvrement, grâce à l’intervention divine, de la liberté perdue.
Et dans la deuxième lecture, saint Paul s’adresse aux Corinthiens en ces termes : « Frères, si quelqu’un est en Jésus Christ, il est une créature nouvelle. Le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau est déjà né. Tout cela vient de Dieu ». Ici la réconciliation est le passage d’un monde de vieilles et mauvaises habitudes à un monde nouveau réalisé par Dieu en Jésus Christ. C’est le recouvrement de la bonté, de la beauté.
Enfin, dans l’évangile, le père dit aux domestiques à propos de l’enfant qui est revenu à la maison: « […] mon enfant que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé ». Et plus tard il dit à son fils aîné : « Il fallait bien festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé ». Dans ce contexte, la réconciliation, c’est le passage de la mort à la vie. C’est le recouvrement de la joie.
En fait, on ne peut parler de réconciliation s’il n’y a pas eu antérieurement division, séparation, antagonisme. Quelles sont alors les causes de nos divisions ? De nos séparations ? De nos antagonismes ?
- Dans l’évangile, on peut en trouver deux :A) L’égocentrisme : c’est une attitude qui consiste, chez une personne, dans une groupe, à se prendre pour le centre de tout, à ne voir, à ne valoriser et à ne poursuivre que ses intérêts personnels. Dans l’évangile, c’est le cadet de deux fils qui incarne cette attitude. Jésus raconte : « Le plus jeune dit à son père : “Père, donne-moi la part d’héritage qui me revient.” Et le père fit le partage de ses biens. Peu de jours après, le plus jeune rassembla tout ce qu’il avait et partit pour un pays lointain, où il gaspilla sa fortune en menant une vie de désordre ». Quand on est égocentrique, on croit qu’on a toujours raison, on veut décider pour soi et tout aussi facilement pour les autres. On ne prend pas conseil, on fait ce qu’on veut. Ce faisant, on va s’installer dans un pays lointain, c’est-à-dire loin du bien, du beau, de la charité, du respect et des autres valeurs. Cette attitude entraine immanquablement des conflits.
- L’orgueil : c’est une attitude qui consiste, chez une personne, dans un groupe, à se croire au-dessus des autres. Dans l’évangile, incarnent cette attitude les pharisiens, les scribes dont il est dit qu’ils « récriminaient contre [Jésus] » parce qu’il faisait bon accueil aux publicains et aux pécheurs et mangeait avec eux. Incarne également cette attitude l’aîné de deux fils qui n’hésita pas à dire à son père : « Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais désobéi à tes ordres ». Le fils aîné a une haute opinion de lui-même, il méprise son frère cadet et finalement il désobéit à son père. En se mettant en colère, en refusant d’entrer dans la maison, le fils aîné crée une distance entre lui et les autres. Cette attitude, qui nous caractérise peut-être, fait naître ou fait augmenter des conflits.
Pourtant Dieu nous appelle à prendre le chemin de la réconciliation. Pour nous réconcilier avec qui ?
- A) Avec Dieu lui-même : dans la deuxième lecture, saint Paul supplie les Corinthiens et nous avec en disant : « Au nom du Christ, nous vous le demandons, laissez-vous réconcilier avec Dieu ». C’est ainsi que dans l’évangile, il est dit que « Les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter ». Si nous nous tournons vers Dieu, lui nous pardonnera nos péchés et nous pourrons partager sa sainteté comme le dit saint Paul aux Corinthiens.
- B) Les uns avec les autres : dans l’évangile, le fils cadet dit : « Je vais retourner chez mon père ». Retourner chez son père, c’est vouloir rétablir le contact avec lui, c’est faire la paix avec lui. Nous avons tous besoin d’un tel sursaut pour retrouver ceux que nous avons éloigné volontairement ou involontairement de nos vies : peut-être un membre de la famille, peut-être un ami, peut-être un collègue de travail, peut-être un voisin.
- C) Avec soi-même : parlant du fils cadet, l’évangile dit : « Alors il réfléchit ». Avant, il ne réfléchissait pas ; il était superficiel. Réfléchir, c’est retourner dans son cœur pour prendre de justes décisions. C’est cesser de paraître pour être.
Mais pour réaliser la réconciliation, deux attitudes sont importantes :
1° L’humilité : le fils cadet, dans l’évangile, se promit de dire à son père : « Prends-moi comme l’un de tes serviteurs ». Sans l’humilité, on ne peut pas se dépouiller de son égocentrisme ou de son orgueil.
-Est-ce que je suis humble ?
2° La compassion : dans l’évangile, il est dit : « Comme [le fils cadet] était encore loin, son père l’aperçut et fut saisi de pitié ». Sans la pitié, on ne peut pas pardonner. Et sans pardon, il n’y a pas de réconciliation.
-Est-ce que j’ai de la compassion ?
Demandons au Seigneur de faire de nous des artisans de paix.
Père Jean Claude Cabwinwe Ciza