Ez 18, 25-28 ; Ph 2,1-11 ; Mt 21, 28-32
Les textes que l’Eglise nous propose pour notre méditation de ce jour mettent en scène l’attitude de deux jeunes devant la demande de leur Père. Comme nous pouvons le constater d’emblée ; le premier a bien entendu la demande de son Père ; il a refusé d’obéir, puis après, il se révise et va au champ : c’est la démarche de la conversion. Le deuxième accepte du bout des lèvres, mais ne bouge pas : c’est l’attitude de l’irresponsabilité et de la légèreté. A la question de savoir lequel des deux a exécuté la volonté du père, la réponse est sans hésitation : c’est celui qui, après un moment de refus, revient sur sa décision et va travailler au champ. En définitif, ce qui compte vraiment, n’est pas le travail accompli.
A ce premier niveau de lecture, nous pouvons nous poser cette question : à qui ressemblons-nous entre les deux fils? Assurément aux deux fils à la fois. Au premier, chaque fois qu’avec désinvolture nous disons non à Dieu. Avons-nous alors l’humilité nécessaire pour revenir sur notre décision ? Au deuxième, chaque fois que nous promettons sans trop en mesurer les conséquences. Sommes-nous alors assez courageux pour tenir nos engagements envers Dieu ?
Vous aurez remarquez avec moi qu’en racontant cette brève parabole, Jésus, ne se livre pas à une fiction littéraire ; c’est plutôt la situation regrettable des pharisiens et des notables religieux qu’il cherche à dénoncer avec vigueur en ces termes : « Amen, je vous le déclare : les publicains et les prostituées vous précèdent dans le Royaume de Dieu » !
Mes frères et sœurs, laissons alors l’évangile nous interroger à nouveau. Les pharisiens d’aujourd’hui, c’est peut-être nous qui appartenons à l’Eglise qui exerçons une certaine responsabilité en son sein. C’est peut-être moi prêtre de Jésus-Christ, c’est toi religieux-religieuse appelé à être modèle de disciple pour les autres ; c’est toi, catéchiste ou membre d’une association ; c’est toi, choriste ou enfant de chœur ; c’est toi père ou mère de famille ; c’est toi cadre catholique, artisan, commerçant, chômeur ou étudiant, qui as reçu la mission d’ être sel de la terre et lumière pour les autres ; c’est toi, enfant, jeune ou adulte, baptisé au nom de la Sainte Trinité. Alors, qu’avons-nous fait de nos promesses baptismales ?
Retenons que sans choquer personne, Jésus déclare aux pharisiens de son temps, et à nous aujourd’hui membres de son Eglise, que les publicains et les prostituées nous précèderont dans le Royaume des cieux, pour deux raisons toutes simples :
- Lorsqu’on estime être des justes, on ne pense plus à la conversion. Or c’est seulement ce changement de cœur qui sauve, et les pécheurs publics l’ont bien compris.
- D’’autre part, lorsqu’on se présente devant tous comme des saints, on pense être déjà parvenus au but : il n’est dès lors plus nécessaire de se gêner, de faire des efforts. On se contente ainsi de promettre sans même prendre la peine d’accomplir.
De ce constant ; retenons deux choses ou leçons pour notre méditation de ce jour.
- Devant Dieu, ne nous y trompons pas : ce ne sont pas nos paroles mais nos actes qui nous jugent ; ce n’est pas la beauté de nos prières et la solennité de nos célébrations qui rendent justes devant Dieu, mais l’accueil que nous réservons à la miséricorde ainsi que notre obéissance à sa parole. Bien loin d’être un passeport garantissant l’entrée dans le Royaume de cieux, le baptême est plutôt un appel à travailler pour l’avènement du Règne du Christ en nous et autour de nous. Retenons, qu’aux yeux de Dieu, un petit geste de charité vaut mieux qu’un beau discours sur l’amour ; une petite visite à un malade a plus de prix qu’une prédication sur les œuvres de miséricorde et un geste de pardon est plus éloquent qu’une dissertation sur la paix.
La vérité de l’homme se découvre dans ses actes, puisque devant Dieu la tricherie et la duplicité ne sont possibles. C’est seulement à travers nos engagements que notre foi s’exprime.
- Le « oui » du présent, face au « non » du passé ou encore ; le « oui » du passé, face au « non » du présent ? pour illustrer ce que je veux dire, je vous raconte une histoire vecue dans une paroisse chez moi. « un jour le curé venait de confier une responsabilité de taille à un homme dont il apprécie énormément le dévouement. Une personne effacée et humble, très engagée dans la paroisse mais discrètement aussi. Le problème c’est qu’il ne fait pas partie de la famille qui avait donné le terrain à la mission ; il n’a d’ailleurs pas eu la chance d’être baptisé par les premiers missionnaires de la paroisse. De plus, c’est un converti de fraîche date dont on connaît l’histoire. Alors, les anciens de la paroisse ont été choqué et ont commencé à se demander : comment, s’interroge-t-on avec indignation, le curé peut-il se permettre d’ignorer les droits acquis des chrétiens « plus expérimentés » ? mais ce qui est étonnant aussi est que ceux-ci n’apparaissent souvent que quand il y a des postes de responsabilité à briguer ou des places d’honneur à revendiquer lors des grandes manifestations. Leur passé, plein de mérites réels ou supposés, semble les dispenser de tout effort dans le présent ». Pour eux, le « oui » d’hier peut valablement remplacer le « non » d’aujourd’hui. D’après vous, ont-ils raison ?
Demandons la grâce d’être obéissants devant Dieu, la grâce de la fidélité dans nos engagements baptismaux.
Abbé Jean Claude Ciza
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