Is 35, 4-7 ; Jc 2, 1-5 ; Mc 7, 31-37
Les lectures que nous venons d’entendre, en ce vingt-troisième dimanche du temps ordinaire, nous parlent du salut.
Le salut est une remise en état. On sauve quelque chose en le récupérant. On sauve quelqu’un en venant à son secours. Par exemple, un fauteuil est très abîmé. On le fait réparer. Ce faisant, on le sauve, car on aurait bien pu aussi s’en débarrasser. Quelqu’un nage dans une rivière ou dans un lac, il attrape des crampes et ne sait plus avancé. Il fait des gestes agités, on s’aperçoit qu’il est en difficulté. On lui apporte de l’aide. On le sauve, car il aurait bien pu aussi se noyer.
Il y a salut là où il y a préalablement un problème. Alors qu’est-ce qui ne va pas avec nous pour que Isaïe nous dise dans la première lecture : « [Dieu] vient lui-même et va vous sauver » ?
Les lectures mentionnent une série de misères dans lesquelles nous sommes plongés.
Chez Isaïe, nous apprenons que nous sommes :
A) Des aveugles : nous avons beau ouvrir nos yeux, spirituellement nous sommes des malvoyants. Nous ne nous voyons pas bien. Nous doutons de ce que nous sommes, de nos capacités. Et nous ne voyons pas bien les autres, qu’il s’agisse de nos familiers, de nos voisins ou de nos collègues. Nous ne voyons pas le bien qu’ils font. Nous ne les prenons pas à leur juste valeur, celle d’être des créatures de Dieu, égales à nous-mêmes. Nous ne les voyons qu’à travers nos intérêts personnels. Saint Jacques aussi, dans la deuxième lecture, dénonce cet aveuglement qui veut que nous traitions bien certains et maltraitions d’autres.
B) Des sourds : nous avons beau ouvrir nos oreilles, spirituellement nous sommes des malentendants. Nous avons du mal à nous écouter pour nous connaître vraiment. Nous bouchons les oreilles quand les autres nous parlent de leurs problèmes, voire de leurs joies. Nous coupons les liens avec les autres. Nous ne nous souvenons d’eux que quand nous sommes sûrs de pouvoir les utiliser pour atteindre nos propres fins.
C) Des muets : nous avons beau ouvrir la bouche, spirituellement nous ne savons pas parler correctement ni de nous-mêmes ni des autres. Nous ne savons pas traduire dans des mots compréhensibles ce que nous sentons, ce que nous pensons. Des autres, nous ne savons dire que du mal : nous critiquons, nous salissons, nous divisons, nous détruisons.
D) Des boiteux : nous avons beau nous lever, spirituellement nous ne savons pas avancer. Cela peut signifier que nous sommes des éternels hésitants. Nous ne savons pas faire des choix durables dans nos études, dans notre travail, dans nos relations, dans nos engagements. Il est difficile pour les gens de nous faire confiance. Mais cela peut signifier aussi que nous sommes renfermés sur nous-mêmes. Nous érigeons des barrières pour nous isoler les uns des autres. Nous créons des prétextes qui finissent par nous paralyser et nous rendre étrangers les uns aux autres.
E) Des déserts, des terres arides, des pays torrides : nous avons beau accueillir les gens dans nos cœurs, spirituellement nous finissons par les dessécher. Cela est dû au fait que nous ne savons pas ce que veut dire « aimer ». Nous sommes égoïstes et fins calculateurs. Nous savons recevoir, mais nous ne savons pas donner. Nous rendons les gens méchants, difficiles comme nous-mêmes.
On pourrait se dire : « Mais ce tableau est sombre ! ». Oui, il est sombre. Mais pourquoi sommes-nous ainsi ? Nous pouvons dire que nous sommes ainsi parce que nous faisons la confusion entre nos intérêts et la foi. Saint Jacques dit dans la deuxième lecture : « Mes frères, ne mêlez pas des considérations de personnes à la foi en Jésus-Christ ». Très souvent, au lieu de nous laisser guider par la foi, nous guidons la foi au gré de nos intérêts. Nous ne servons pas le Christ, mais nous nous servons au nom du Christ, nous éteignons en nous la lumière du Christ.
Pourtant Dieu ne nous abandonne pas comme nous le dit Isaïe dans la première lecture. Il nous restaure, il nous recrée, il nous sauve en Jésus-Christ. Comment Jésus s’y prend-il ? C’est l’évangile qui nous donne la réponse :
A) Il nous rejoint dans notre milieu de vie : saint Marc écrit en effet : « Jésus quitte la région de Tyr ; passant par Sidon, il prend la direction du lac de Galilée et va en plein territoire de la Décapole ». Ce territoire, c’est chez nous.
B) Il nous amène à l’écart, loin de la foule : Jésus tient à établir avec chacun de nous une relation personnelle, loin des prétextes, loin des quiproquos.
C) Il met ses doigts dans nos oreilles et il pose sa salive sur nos langues : par ces gestes, il nous montre qu’il est proche de nous, qu’il nous libère et nous bénit pour qu’à notre tour nous puissions libérer les autres et les bénir.
D) Il lève les yeux au ciel : par là il nous rétablit dans l’amitié avec Dieu. Il veut que nous devenions capables de demander conseil à Dieu avant d’agir.
Cependant, Dieu ne nous sauve pas sans nous. Il veut que nous puissions collaborer à notre salut. Comment ?
A) En nous entraidant les uns les autres : dans l’évangile, il est dit : « On lui amène un sourd-muet et on le prie de poser la main sur lui ». En nous entraidant, nous ouvrons la porte au bien.
-Est-ce que je suis prêt à aider ceux qui souffrent et qui crient vers moi ?
B) En ayant du courage : nous avons entendu dire dans la première lecture : « Dites aux esprits affolés : Prenez courage ». La crainte paralyse, le courage rend fort.
-Est-ce que je suis prêt à avoir du courage dans ma vie ?
Demandons au Seigneur d’affermir notre foi en lui.
Abbé Jean Claude Ciza
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