Sg 2, 12-20 ; Jc 3, 16-4, 3 ; Mc 9, 30-37
En ce vingt-cinquième dimanche du temps ordinaire, les lectures nous invitent à méditer sur le mal.
Les hommes ont beaucoup réfléchi et réfléchissent encore sur le mal. Cela est dû au fait que l’homme se sent habité par le mal au quotidien. Un théologien allemand contemporain du nom d’Eugen Drewermann a écrit sur le mal une thèse de doctorat en 3 volumes qui ensemble font un total d’à peu près 1575 pages. La thèse est intitulée, si l’on traduit mot à mot le titre allemand : Les structures du mal. C’est une étude exégétique, psychanalytique et philosophique de onze premiers chapitres du livre de la Genèse. Le livre pour venir au jour des anciens Égyptiens, dit Livre des Morts par les égyptologues, a consacré tout le chapitre 125 à la question du mal. Dans ce chapitre, le défunt qui affronte le tribunal d’Osiris et dont le cœur est pesé, examiné pour voir s’il a vécu selon la justice, rejette 42 maux qu’il dit n’avoir pas commis dans sa vie.
Mais qu’est-ce que le mal ? Le mal est un déficit du bien vu comme l’idéal de ce que l’homme, tout homme doit accomplir. On tombe dans le mal quand on s’écarte de ce qui est normalement acceptable. Ainsi je peux dire de quelqu’un qu’il me regarde mal, pour signifier qu’il ne me regarde pas comme il aurait dû normalement me regarder. À cause de cela, son regard me fait peur, me donne la chair de poule, m’inquiète.
Le mal peut aussi contenir l’idée de douleur. Ainsi, si je dis que j’ai mal à la tête, j’insinue par là que j’ai des douleurs dans la tête, que ces douleurs m’empêchent de me sentir dans mon assiette, de me sentir bien.
Le mal est donc le contraire du bien.
Comment selon l’Écriture, le mal se manifeste-t-il chez l’homme ?
La première lecture, du livre de la Genèse, nous présente deux aspects du mal :
A) D’abord le penser mal : il consiste à imaginer en soi-même comment faire du tort à l’autre. « Ceux qui méditent le mal, avons-nous entendu dans le livre de la Sagesse, se disent en eux-mêmes : “Attirons le juste dans un piège” ». On peut penser mal de l’autre, selon le livre de la Sagesse, pour deux raisons :
1° Le refus de reconnaître ses limites : l’autre, si c’est un homme de bien, devient un miroir qui nous renvoie à nous-même. Mais puisque nous ne voulons pas nous savoir dans le mal, nous cherchons à éliminer celui qui par sa présence ou par sa conduite nous rappelle que nous sommes dans le mal.
2° La volonté de faire tomber l’autre dans le mal : on n’aime pas être tout seul dans le mal. Alors on cherche activement à y attirer l’homme à la bonne réputation. On éprouve sa patience pour voir jusqu’où il peut aller, on veut transformer sa douceur en amertume, on veut voir si Dieu l’inspire et le protège toujours.
Dans le livre de la Genèse, nous apprenons que Caïn avait d’abord mal pensé d’Abel. « Le Seigneur dit à Caïn : “Pourquoi t’irrites-tu ? Et pourquoi ton visage est-il abattu ? Si tu agis bien, ne le relèveras-tu pas ? Si tu n’agis pas bien, le péché, tapi à ta porte, est avide de toi. Mais toi, domine-le” ».
-Qu’est-ce que nous n’imaginons pas des autres ?
B) Ensuite le mal agir : il consiste à passer à l’action, en causant à l’autre du tort, dans son corps. Dans le livre de la Sagesse, nous avons entendu le méchant dire : « Condamnons-le [le juste] à une mort infâme ». C’est le mal au plus point. C’est lui qui fait que les gens recourent aux empoisonnements, aux assassinats, à la sorcellerie, à l’exclusion, et à d’autres choses du même genre.
Jésus l’avait pressenti pour lui-même. Dans l’évangile, il dit aux disciples : « Le Fils de l’homme est livré aux mains des hommes ; ils le tueront ». Caïn l’avait réalisé sur la personne d’Abel : « Caïn parla à son frère Abel et, lorsqu’ils furent aux champs, Caïn attaqua son frère Abel et le tua ».
-Quel traitement n’infligeons-nous pas aux autres ?
Mais d’où vient le mal ?
Selon saint Jacques, dans la deuxième lecture, le mal a pour sources des « instincts qui mènent leur combat » en nous. Ces instincts sont :
A) La jalousie : ou le fait de souffrir de voir l’autre différent de nous ;
B) Les convoitises : ou l’envie de posséder ce qui ne nous appartient pas, voire même de posséder les autres ;
C) Les rivalités : ou le désir de se montrer plus important que les autres.
Et où mène le mal ?
Selon saint Jacques, le mal mène à l’éloignement de Dieu de notre vie. Il nous dit en l’occurrence : « Vous n’obtenez rien parce que vous ne priez pas ; vous priez mais vous ne recevez rien parce que votre prière est mauvaise : vous demandez des richesses pour satisfaire vos instincts ».
Aujourd’hui, Dieu attend autre chose de nous. Il veut, selon les mots de saint Jacques, que nous puissions accueillir la sagesse qui vient de lui. Cette sagesse qui vient de Dieu, c’est Jésus qui traversait la Galilée avec ses disciples pour arriver à Capharnaüm, pour arriver chez nous. En Jésus, Dieu s’est fait proche de nous, de chacun de nous. Que nous apporte Jésus ? Il nous apporte les dons de Dieu que sont, selon saint Jacques et l’évangile : la droiture, la paix, la tolérance, la compréhension, la miséricorde, la générosité, l’impartialité, l’honnêteté, la discrétion, la patience, l’humanité, le service. Tous ces dons peuvent être compris par un seul, à savoir la paix. Saint Jacques dit à ce propos : « C’est dans la paix qu’est semée la justice, qui donne son fruit aux artisans de la paix ».
-Est-ce que nous promouvons la paix en nous et autour de nous ?
Demandons à Dieu d’ouvrir nos cœurs à sa sagesse pour que nous soyons victorieux du mal.
Abbé Jean Claude Ciza
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